Précédent : Rébellion morisque | |||
Concurrent : Guerres de religion françaises, guerre de Trente Ans | |||
Suivante : Guerre franco-espagnole | |||
Révolte des Pays-Bas | |||
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Date : 1568-1648 | |||
Lieu : Pays-Bas espagnols (Pays-Bas et Belgique actuels) | |||
Résultat : Indépendance des Pays-Bas | |||
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Combattants | |||
Provinces-Unies |
Empire espagnol |
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Commandants | |||
Guillaume le Silencieux † |
Philippe II d’Espagne |
La révolte hollandaise, communément appelée la guerre de Quatre-vingts ans, est constituée de deux révoltes contre l’Empire espagnol des Habsbourg par les protestants hollandais des Pays-Bas. La révolte, qui commença par une vague de vandalisme pieux en 1566, ne prit fin qu’avec la paix de Westphalie qui accompagna la fin de la guerre de Trente Ans en 1648, les Provinces-Unies obtenant leur indépendance.
Contexte
Avec l' »État-nation » qui commençait tout juste à émerger en Europe, des problèmes dynastiques se posèrent rapidement. Les liens familiaux traversaient les frontières nationales. Il en allait souvent de même pour la loyauté d’un souverain.
Pouvoir dynastique
Charles Ier d’Espagne était aussi Charles V, empereur du Saint-Empire romain germanique. Il était né à Gand, dans l’actuelle Belgique. Il venait de la possession bourguignonne des Pays-Bas en tant qu’héritier de la maison bourguignonne des Valois. Mais il était aussi le successeur de la maison autrichienne des Habsbourg – sans parler des trônes de Catalogne et d’Aragon.
Roi de la Contre-Réforme
L’Église catholique voyait bien que les protestants avaient puisé dans une faim profondément spirituelle ; elle notait l’énergie des nouvelles congrégations et cherchait à se renouveler par une » Contre-Réforme » avec Charles comme chef temporel. Ayant mené une tentative déterminée de suppression du protestantisme en Allemagne, défaite grâce au soutien français aux princes luthériens allemands, il considère la montée du protestantisme aux Pays-Bas avec inquiétude. Lorsqu’il abdique en 1556 pour se consacrer à la prière, son fils Philippe II d’Espagne poursuit son œuvre.
Philipe II se sentait menacé par toute forme de dissidence ; sous son règne, les activités de l’Inquisition s’intensifièrent. À Grenade, en 1568, les morisques – descendants de musulmans convertis de force au christianisme pendant la Reconquista – organisent une révolte, que Philippe réprime avec une force brutale.
Guerre
Pour les protestants hollandais, les images sacrées de toute sorte étaient de fausses idoles. Les églises catholiques étaient pleines de figures en pierre et en bois, de vitraux et de sculptures. En 1566, une vague protestante de vandalisme pieux a commencé. Philippe II avait toujours soupçonné que le protestantisme était associé au rejet de l’autorité. Les doctrines de Jean Calvin et de Martin Luther avaient pris racine en Europe du Nord, parmi une classe marchande de plus en plus aisée. Les ports et les villes industrielles abritaient des communautés sûres d’elles-mêmes, dont les membres attendaient une certaine indépendance intellectuelle. Lorsque le général espagnol, le duc d’Albe, conduit une armée à Bruxelles en 1567 pour réprimer les rebelles et rétablir le catholicisme, la population se soulève dans une rage patriotique.
La résistance se coalise autour de la figure de Guillaume le Silencieux, prince d’Orange, mais la répression des dissidents est rapide. Des centaines de personnes furent exécutées. Une armée rebelle marcha à Rheindalen en avril 1568, mais ses volontaires ne firent pas le poids face aux soldats de la Couronne espagnole.
Répression et résistance
Les troubles continuèrent. Alba, exaspérée par la défiance des Hollandais, réagit par des atrocités. De terribles massacres eurent lieu à Zutphen et à Naarden, puis à Haarlem en 1573. Loin d’encourager les autres villes à se rendre, ces comportements renforcent leur défiance. Alba trouve ce conflit frustrant. Il savait que ses 60 000 soldats devaient être « un nombre suffisant pour conquérir de nombreux royaumes », et pourtant, se lamentait-il, « ils ne me suffisent pas ici ». Alba prend une ville mais, dès son départ, les rebelles réapparaissent. Le siège de Leyde en 1573 doit être levé lorsque Guillaume le Silencieux apparaît avec une armée de fortune. Alba les vainc à Mookerheyde et reprend le siège en septembre 1574. Les Hollandais ne parviennent pas à déloger les Espagnols et sont sur le point de mourir de faim lorsqu’ils sont secourus par les navires des Watergeuzen (« Mendiants de la mer »). Les geuzen étaient des corsaires calvinistes qui avaient initialement cherché asile dans les ports anglais. Expulsés par Elizabeth I en 1568, ils sont revenus combattre pour les rebelles aux Pays-Bas. Malgré cette rebuffade précoce, l’Angleterre a soutenu secrètement puis, à partir des années 1580, de plus en plus ouvertement la révolte hollandaise.
Une nouvelle approche
Alba est rappelé en Espagne en 1573. Son remplaçant, Luis de Requesens, a du mal à maintenir un cap modéré dans un conflit qui n’est pas seulement exaspérant mais aussi financièrement épuisant. En 1576, les troupes espagnoles ne sont plus payées. Des soldats en colère se déchaînent à Anvers dans un épisode connu sous le nom de « Furie espagnole », tuant 8 000 personnes en trois jours. Calmées, les autorités espagnoles conviennent d’une alliance entre les différentes régions des Pays-Bas des Habsbourg. La Pacification de Gand est signée en 1576. L’Espagne reprend toutefois l’initiative lorsque des fonds importants commencent à arriver des mines d’esclaves américaines. En 1579, le duc de Parme est envoyé comme gouverneur. Son approche « diviser pour mieux régner » joue sur les tensions qu’il constate entre les villes du sud et les centres du nord, plus militants et agressivement calvinistes. Parme persuade les États du sud (aujourd’hui les Flandres) de former l’Union d’Arras, fidèle à l’Espagne. Le nord répond par sa propre Union d’Utrecht. Le duc fait des villes du sud sa base pour une nouvelle campagne de conquête. L’Espagne subit un revers en 1588 lorsque l’Armada, envoyée pour faire la guerre à l’Angleterre, est vaincue. Guillaume le Taciturne meurt en 1584 : son fils, Maurice de Nassau, compte parmi les plus grands généraux de l’époque, créant une cohérence dans ce qui avait été un assemblage mal assorti de milices volontaires et de mercenaires. Bien que sa reconnaissance de la nécessité de faire de son armée une machine de combat semble moderne, son objectif déclaré était de former son armée de manière plus romaine (« à la manière romaine »), et il a puisé nombre de ses idées chez les anciens. Ses hommes effectuaient d’interminables exercices respectifs avec des piques et des mousquets, chaque exercice étant décomposé en mouvements individuels et numérotés. Il rationalisa les structures de l’armée, formant de nouveaux officiers pour commander des compagnies plus petites. Maurice de Nassau a ainsi construit une force de combat plus flexible.
Il fait ensuite tout ce qui est en son pouvoir pour la garder en sécurité. En 20 ans (tout en assiégeant des villes et en attaquant des forteresses), il s’arrange pour ne livrer que deux batailles rangées. En 1600, cependant, sa supériorité tactique est démontrée lorsqu’il bat l’Espagne à Nieuwpoort, près de Dunkerque. Moins heureusement pour Maurice, le brillant général et fianncier italien, Ambrogio Spinola, entre au service de la Couronne. Mais à partir de 1609, les hostilités sont suspendues pendant la trêve de douze ans.
Maîtrise de la marine
La guerre de Trente Ans débute en 1618, et les combats reprennent aux Pays-Bas en 1621. La santé de Maurice de Nassau est défaillante et il ne peut empêcher Spinola de prendre la ville cruciale de Breda en 1625. À ce moment-là, Maurice est gravement malade – il meurt pendant le siège de Breda. Son demi-frère, Henry Frederick, prend le commandement.
Les Hollandais font néanmoins de bons progrès en mer. En 1628, Piet Heyn capture la flotte du trésor espagnol. Ses navires ramenaient de l’argent des mines du Nouveau Monde – leur perte fut une profonde humiliation et un coup dur pour l’Espagne. La guerre maritime évolue rapidement – les navires équipés de canons latéraux deviennent la norme, et les Néerlandais en acquièrent rapidement la maîtrise. Ils l’avaient montré dès 1607 lors de leur audacieuse attaque contre les Espagnols au large de Gibraltar. En 1639, lors de la bataille des Downs, juste au large des côtes anglaises, Maarten Tromp et ses compagnons de mer sauvèrent une flotte espagnole apportant des renforts pour l’effort de guerre en Flandre.
L’Espagne était à court d’options. Elle n’avait pas été vaincue, mais il n’y avait pas non plus de perspective réaliste de victoire – l’argent s’épuisait et des vies étaient perdues. Lorsque la guerre de Trente Ans s’achève en 1648, le pouvoir de l’Espagne est affaibli. Le pays a finalement reconnu l’indépendance de la République hollandaise.
Les suites
La révolte hollandaise a fait de nombreuses victimes et a détruit de nombreuses villes. Les survivants devaient être témoins de nombreux changements alors que leur pays se réjouissait de sa nouvelle indépendance.
La guerre de Trente Ans
Ceux qui ont survécu à la révolte hollandaise – en particulier dans les villes du nord – ont découvert un nouveau sentiment d’identité nationale. Bien qu’ils n’aient été impliqués que de manière périphérique dans le déroulement des agonies de la guerre de Trente Ans, ils ont ressenti les turbulences que le conflit a provoquées au cœur de l’Europe.
Dès que les hostilités ont cessé et que le traité de Westphalie a été signé en 1648, les Pays-Bas ont prospéré. Nouvelle force économique et culturelle en Europe du Nord, le pays devient une puissance militaire émergente, sa puissance maritime croissante l’opposant à l’Angleterre lors de la guerre anglo-hollandaise.
En tant que marins intrépides, les Hollandais ne tardent pas à ouvrir de nouvelles zones d’exploitation coloniale dans les Indes orientales. Certaines de ces conquêtes devaient les hanter bien plus tard, notamment lorsque l’Indonésie lutta pour son indépendance dans les années qui suivirent la Seconde Guerre mondiale.