Chère rédactrice en chef,
La morsure de serpent est une expérience effrayante pour quiconque, enfants et adultes confondus. Personne n’ose affronter un serpent à moins d’avoir été entraîné et même dans ce cas, on éviterait à tout prix de se faire mordre par cette créature mortelle. Une personne peut accidentellement être victime d’une morsure de serpent après avoir marché sur un serpent dans l’obscurité ou en marchant dans l’herbe. La personne devient cependant extrêmement vigilante dans de telles circonstances, surtout si elle est consciente de la possibilité que des serpents se promènent dans les environs. Elle prendra des précautions, comme porter une lampe de poche, ou évitera de s’approcher du serpent repéré. En revanche, une personne sous l’emprise de l’alcool peut devenir aventureuse et perdre toute inhibition. Sa capacité à évaluer les conséquences et sa clairvoyance à percevoir le danger peuvent être émoussées. Nous présentons ici un cas intéressant de morsure de serpent « invitée » chez une victime qui était sous l’influence de l’alcool au moment de la morsure. Le cas a été rencontré par l’auteur pendant son mandat administratif dans un hôpital insulaire à Port Blair.
Un agent de sécurité de 45 ans a consommé deux grandes boissons après ses heures de service dans la soirée, suivies d’un dîner. Après le dîner, il a rempli de l’eau potable dans une bouteille en plastique pour l’utiliser pendant la nuit et a commencé à marcher vers son logement résidentiel qui était à proximité. Il aperçoit un serpent dans l’escalier du rez-de-chaussée. Au lieu d’éviter le serpent, il s’est assis à côté de lui et a commencé à frapper la créature avec sa pantoufle ! Le serpent l’a mordu à son tour à l’index droit et, avec difficulté, il a réussi à détacher le serpent de son doigt. Il a jeté le serpent par terre et a commencé à le frapper avec la bouteille d’eau remplie qu’il portait ! Une fois que le serpent est devenu moins actif en raison de sa blessure, il a vidé la bouteille d’eau et a guidé le serpent blessé, mais en mouvement, dans la bouteille en plastique (Fig. 1). Ses voisins ont senti le danger et l’ont emmené à l’hôpital pour le soigner. À ce moment-là, il y avait un œdème important de la main et du poignet avec un suintement du site de ponction (Fig. 2). La tête et certaines parties du corps du serpent étaient gravement blessées et saignaient. La victime était d’humeur joyeuse, sous l’influence de l’alcool. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi il avait mis le serpent dans la bouteille, ce qui aurait pu entraîner d’autres morsures, il s’est souvenu du cours où on lui avait dit que l’idéal était d’apporter le serpent à l’hôpital pour l’identifier ! Ses paramètres de coagulation étaient gravement perturbés et il a dû être traité dans l’unité de soins intensifs avec 12 flacons de venin anti-serpent. D’un point de vue clinique, il s’agissait d’une morsure de vipère car il n’y avait aucune manifestation neurologique. Il s’est rétabli sans problème et est sorti de l’hôpital une semaine plus tard. Des efforts ont été faits pour sauver le serpent mais le reptile est mort après trois heures.
Serpent blessé dans la bouteille d’eau vide.
Marque de morsure avec gonflement à progression rapide de la main droite.
La consommation d’alcool peut augmenter le risque de morsure de serpent, en particulier dans les cas d’exposition intentionnelle. Morandi et al. ont analysé les facteurs de pré-exposition dans leur étude sur les morsures de serpent et ont trouvé une prévalence écrasante de la consommation d’alcool dans le groupe d’exposition intentionnelle.1 On a noté que 40 % (12/30) de tous les sujets avaient consommé de l’alcool comme facteur ayant précédé la morsure. Toutes les victimes de morsures de serpent liées à l’alcool étaient des manipulateurs non professionnels et non qualifiés, participant à une forme de manipulation récréative des serpents. De leurs observations, les auteurs ont conclu que l’alcool est un facteur de pré-exposition conduisant à un risque probablement accru de morsure de serpent. Menon et al. ont également souligné l’observation d’un nombre significatif de victimes masculines sous l’influence de l’alcool lorsqu’elles ont été mordues par des serpents.2 Le cas présenté ici souligne la nécessité d’être prudent pour tout le personnel qui travaille dans un environnement prédisposant aux morsures de serpent, en particulier après la consommation d’alcool. Le raisonnement émoussé de ces personnes peut les empêcher de faire preuve de la prudence requise.
Le patient rapporté ici n’avait aucune expérience de la manipulation de serpents. Il a lui-même admis qu’il avait très peur des serpents, mais sous l’influence de l’alcool, il a trouvé le courage d’affronter le reptile mortel ! Sa première déclaration, dans un état d’ébriété à son arrivée aux urgences, était qu’il voulait se venger en mordant le serpent à son tour ! Le lendemain matin, le patient s’est excusé et a eu honte d’affronter l’équipe soignante. L’influence d’un « poison » a émoussé son jugement et l’a conduit à une morsure de serpent évitable avec envenimation qui aurait pu entraîner la mort ! Heureusement, le patient a survécu sans aucune séquelle pour décrire de manière vivante l’histoire de sa (més)aventure !
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